Texte d'après un tableau du peintre Aldéhy
Est-ce une arlequine ou une reine, un oiseau de théâtre ou bien une
femme-messie, une baladine ou une prophétesse ?
Ses grands airs, c'est certain, lui confèrent l'envergure des destinées
légendaires. Sa face impérieuse en dit long sur ses pensées insondables.
La figure de cette énigmatique incarnation reflète je ne sais quelle
immensité : un océan de brume, un horizon de nuages ou peut-être un vaste
souffle dans la plaine...
Hôte d'un cirque ou d'un trône, peu importe, cette inconnue arbore les
allures augustes d'une voyageuse des hauteurs, d'une colporteuse de mystères,
d'une apôtre des rêves.
Ce chaperon rouge au regard astral nous fixe comme une chouette. Ou comme
une farce, pour le dire autrement.
On devine cependant la gravité de son âme et la légèreté de ses ailes. On
sent l'importance de sa personne et on voit l'éclat de son front d'impératrice.
On se doute qu'elle a d'illustres paroles a répandre sur le monde.
On s'imagine aisément que tant de prestance et de solennité doivent
nécessairement représenter des causes supérieures... Mais faut-il vraiment se
fier aux artifices de cette allégorie ?
Il est possible que cette royale présence ne soit finalement qu'un masque,
qu'une vulgaire saltimbanque, qu'une ingénue grimée en oracle, qu'une simple
étincelle d'un soir singeant une étoile.
Pitre ou mythe, les étranges rayons qu'elle dégage touchent les humbles
mortels que nous sommes.
Qu'elle soit sincère ou qu'elle nous joue la comédie, il n'en reste pas
moins qu'elle fait autorité par la seule vertu de sa tête surmontée d'un
chapiteau d'écarlates certitudes...
Astre authentique ou flamme factice, cette vraie pharaonne ou fausse déesse
nous apparaît, et c'est là l'essentiel, aussi pénétrante, inestimable et
fabuleusement dérisoire qu'une poétesse.
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